Près de 5000 Balmat au Brésil
Voilà 200 ans, deux familles semsaloises embarquaient vers Nova Friburgo. Avant d’essaimer
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Nadine Crausaz
25 juin 2019 à 04:01
Mémoire » Les deux familles Balmat de Semsales, celles des cousins André (meunier) et Joseph (cordonnier) ont embarqué le 4 juillet 1819 depuis Estavayer-le-Lac à destination du Brésil. Pour conjurer les inquiétudes qui les étreignaient à l’aube de la traversée de l’Atlantique, ils s’étaient tous mis, petits et grands, à rêver de soleil, de conquêtes et de vastes étendues.
Sous les tropiques, ils durent vite déchanter. La topographie de la future Nova Friburgo et sa région ressemblait à s’y méprendre à celle de la Veveyse ou de la Gruyère. Cette contrée montagneuse – avec un pic surplombant la bourgade de Lumiar qui fut baptisé Moléson – ne convenait guère à leurs projets de cultiver de grandes terres fertiles.
Dépités, des migrants suisses vendirent leur lopin aux Allemands arrivés juste après. Eux qui avaient fui la famine en Suisse n’allaient pas replonger dans les affres de la misère au Brésil! Ils s’orientèrent alors vers les Etats de Minas Gerais, de Santa Catarina ou du Parana.
Un travail de fourmi
Au cours des 200 dernières années, la plupart des Balmant (à leur arrivée à Nova Friburgo, le patronyme Balmat s’est transformé en Balmant) ont ainsi déserté Nova Friburgo, la «terre promise». A l’instar de Cid Balmant (86 ans). Avec son épouse Ruth, ils ont choisi la ville de Franca, à 400 kilomètres de Sao Paulo, pour couler une retraite paisible.
Cid Balmant exhibe avec fierté un épais classeur qu’il manipule avec précaution. Il a répertorié des dizaines de fiches qui composent son arbre généalogique et comptabilise pratiquement 5000 Balmant, répartis sur neuf générations. Un logiciel trouvé sur internet a aussi grandement facilité son travail.
Dans les années 1950, Cid a commencé à s’intéresser à l’histoire de la migration: «Je me suis mis à écrire au sujet de notre famille Balmant. Puis, vers 1990, une fois la retraite venue, j’ai eu envie d’en apprendre davantage.» Même s’il ne parle pas en français, Cid tient comme à la prunelle de ses yeux à son exemplaire du livre écrit par les Fribourgeois Georges Ducotterd et Robert Loup, Terre! Terre!… L’ouvrage relate cette incroyable épopée. «Cela m’a beaucoup donné à méditer sur le destin qui a fait que nous sommes là désormais.»
Cid éprouve un attachement passionné et admiratif pour ses valeureux ancêtres. Il a toujours une histoire à raconter sur presque tous les membres de sa famille la plus proche. «Mon arrière-arrière-grand-père, Jacques, par exemple. Il est là… Voyez toute sa descendance… Il y avait un autre Jacques très connu en Europe, qui demeura le premier à gravir le Mont-Blanc. Mais notre trisaïeul était tout juste âgé de 3 ans quand il a accompli la grande traversée, en compagnie de ses parents et de ses quatre grands frères et sœurs, à bord du bateau Urania. Il a eu par la suite une grande progéniture, ici au Brésil, avec huit enfants. Sa sœur aînée Anne-Marie a donné naissance, quant à elle, à 14 enfants. Mon grand-père Bento a eu 46 petits-enfants au total.» Grâce à des alliances avec les familles Marchon, Robadey, Jaccoud, Boechat ou Moser, les Balmant ont ainsi généré une très grande dynastie «helvétique» de l’autre côté de l’Atlantique.
Devenus luthériens
La parenté est disséminée dans tout le Brésil, mais, en bon patriarche, Cid prend régulièrement des nouvelles. Il téléphone pour souhaiter un bon anniversaire, compatit lors de décès et félicite les parents des nouveau-nés. La famille est aussi réunie dans un groupe sur Facebook pour faciliter la communication.
La première rencontre historique avec les cousins suisses a eu lieu en 1982. Janine Crausaz-Balmat, de Villeneuve, et sa famille avaient répondu à l’invitation de Manyr et Isabel Japor (de la lignée Balmant-Moser). A Curitiba, une churrasqueira (grand barbecue) avait alors réuni des dizaines de Balmant pour cette journée mémorable. Les relations sont restées cordiales au fil des années entre les familles, en dépit de la distance.
A Nova Friburgo, il existe une Rua Balmant, dans le Parque Residencial Solares. A Sao Paulo, les Balmant jouissent aussi de leur petite notoriété, avec un passage qui porte le nom de Vicente David Balmant, bienfaiteur de son église. Au départ, la famille Balmat était catholique pratiquante, mais l’influence des Allemands luthériens a été prépondérante. Cid est membre de l’Eglise presbytérienne: «Pratiquement 90% de la famille sont de confession évangélique, méthodistes, adeptes de l’Assemblée de Dieu, etc.» Le chanteur Douglas Balmant est connu dans le pays pour ses compositions inspirées des passages de la Bible, dans un style musical similaire au gospel américain.
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