Logo

Canton

Ministre, un emploi comme un autre

Les conseillers d’Etat devront-ils renoncer à leur rente à vie et cotiser pour leur retraite? Réponse jeudi

Les membres du Gouvernement fribourgeois se disent prêts à être affiliés à la Caisse de prévoyance du personnel de l’Etat.

 Magalie Goumaz

Magalie Goumaz

21 mai 2019 à 01:12

Rémunération » Et si Fribourg supprimait la rente à vie de ses conseillers d’Etat? Le gouvernement actuel est prêt à faire ce pas, et le Grand Conseil en débattra jeudi.

Les députés Nicolas Kolly (udc, Essert) et Romain Collaud (plr, Massonnens) ont ouvert les feux l’an dernier en déposant une motion à ce propos. Ils notaient alors que, selon les comptes 2017, l’Etat de Fribourg avait versé près de 2 millions en guise de rente pour ses anciens conseillers d’Etat. Un montant supérieur aux salaires cumulés des élus actuels, qui s’élèvent à 1,8 million de francs, ou 256’000 francs par personne.

Dans le scénario classique, un membre du Conseil d’Etat de 65 ans et plus par exemple, qui quitte ses fonctions après trois législatures, touche une rente annuelle de 154’000 francs (60% de son ancien traitement). A 60 ans, il perçoit 50% de son ancien salaire, soit 128’000 francs. Avant, tous les conseillers d’Etat qui quittent leur fonction après avoir atteint l’âge de 50 ans ou ont assumé cette tâche pendant dix ans au moins continuent à toucher une partie de ce traitement.

« Nous prenons nos responsabilités »

Georges Godel

Pour Nicolas Kolly, le Conseil d’Etat s’octroie «un privilège démesuré». Il parle aussi d’une tradition dépassée. «Aujourd’hui, le monde du travail impose à tous de la flexibilité. On n’exerce plus la même profession toute sa vie. Chacun doit pouvoir rebondir», explique-t-il.

Le moment choisi pour changer de système n’est pas innocent. Tous les employés de l’Etat devront faire des sacrifices pour assainir leur caisse de prévoyance. Le projet de réforme, contesté par les concernés, est en cours. Les deux motionnaires estiment ainsi que le moment est opportun pour affilier les conseillers d’Etat à la Caisse de prévoyance du personnel de l’Etat et abolir les rentes à vie.

Egalité de traitement

Cet argument a convaincu le Gouvernement fribourgeois lui-même, qui parle d’une «solution simple, moderne et équitable». «Nous prenons nos responsabilités. Nous ne pouvons pas demander des efforts au personnel sans en faire nous-mêmes. Nous ne serions pas pris au sérieux», déclare Georges Godel, conseiller d’Etat chargé de la Direction des finances.

D’ailleurs, la rente à vie des anciens conseillers d’Etat a été remise en question lors de la consultation sur le projet d’assainissement de la caisse de pension. Par l’UDC mais également par le Parti socialiste. «Au niveau financier, la mesure est peut-être symbolique pour la caisse de pension. Mais il est juste que tout le monde, à l’Etat, soit traité de la même manière. Il faut diminuer les catégories spéciales», estime Benoît Piller, président du PS fribourgeois.

Lire aussi » Prêts à renoncer à leurs rentes à vie (26.04.2019)

Spécificité romande

Plusieurs cantons suisses ont d’ailleurs fait ce pas. Les ministres valaisans sont affiliés auprès de la caisse de prévoyance étatique et ne perçoivent pas d’autres indemnités au terme de leur mandat. Les élus de seize cantons sont affiliés auprès de la caisse de prévoyance cantonale et ne reçoivent une indemnisation qu’à certaines conditions. Enfin, à l’instar de Fribourg, le versement d’une rente viagère a encore cours dans sept cantons, dont Vaud, Genève, Neuchâtel et Berne.

Georges Godel rappelle que la question s’est déjà posée plus d’une fois à Fribourg. En 2004, lors de l’adoption de la loi cantonale relative au traitement et à la prévoyance professionnelle des conseillers d’Etat, des préfets et des juges cantonaux (LTCE), ces derniers ont perdu leur droit à une rente viagère. Ils sont depuis assurés auprès de la Caisse de prévoyance du personnel de l’Etat.

C’est aussi en 2004 qu’il a été décidé de mettre une limite à la rente à vie des conseillers d’Etat, en la supprimant pour ceux de moins de 50 ans ou qui n’ont pas 10 ans de service, au profit d’une indemnité de départ. Depuis, la loi tient également compte des nouveaux revenus des anciens élus, afin d’éviter les cumuls.

En cas d’acceptation de la motion, jeudi, le Conseil d’Etat devra proposer un projet concret. Il annonce déjà qu’il veillera à ce que la fonction reste attractive. Comme la majorité des cantons qui ont affilié les magistrats auprès de leur institution de prévoyance, il faudra envisager un soutien transitoire. Le Conseil d’Etat évoque également une adaptation des salaires aux nouvelles conditions, puisqu’il devra cotiser à la CPPEF. Il estime aussi que l’obligation de restituer à l’Etat des jetons de présence devrait être réexaminée.

Enfin, les préfets sont aussi visés par la motion. A lire leur détermination, ils restent à convaincre.

Ce contenu provient de notre ancien site web. Il est possible que sa mise en page ne soit pas idéale. En savoir plus