Le vote thurgovien anti-français n’en finit pas de faire des vagues
Langues • La volonté du Parlement thurgovien de bannir l’enseignement du français à l’école primaire bouscule le monde suisse de l’éducation.
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ATS
15 août 2014 à 20:17
La volonté du Parlement thurgovien de supprimer l’enseignement du français à l’école primaire («La Liberté» de jeudi) ne respecte pas le mandat constitutionnel. Elle est contraire à la stratégie défendue par la Conférence des directeurs cantonaux de l’instruction publique (CDIP), selon Beat Zemp, président de la Fédération des enseignants alémaniques (LCH).
«La question de l’enseignement des langues étrangères à l’école primaire doit une nouvelle fois être discutée sérieusement», a déclaré Beat Zemp dans une interview publiée hier par la «Basler Zeitung». Les conditions pour assurer l’enseignement de deux langues étrangères au niveau primaire ne sont pas encore réunies, estime-t-il. «Il faut rapidement apporter des améliorations, comme des leçons supplémentaires, des moyens d’enseignement adaptés et un enseignement par demi-classe. C’est pourquoi la LCH plaide en faveur de l’enseignement de deux langues, mais en tenant compte des capacités de chaque enfant.»
Appel au Conseil fédéral
Il est «en partie» exact que certains enfants sont dépassés avec l’apprentissage de deux langues étrangères au niveau primaire. Toutefois, décider de supprimer l’enseignement d’une deuxième langue pour l’ensemble des élèves, y compris les meilleurs, n’est sûrement pas la bonne solution, souligne Beat Zemp.
Le Parti socialiste demande au Conseil fédéral de réagir, par exemple par le biais de la loi fédérale sur les langues. Celle-ci pourrait stipuler de manière plus claire l’exigence d’apprendre une langue nationale comme première langue étrangère. «Nous chercherons une majorité parlementaire d’ici à septembre», assure le conseiller national Mathias Reynard (ps/VS).
La décision du Parlement thurgovien fait également réagir la Conférence intercantonale de l’instruction publique de la Suisse romande et du Tessin (CIIP), qui se dit consternée et irritée. Elle souhaite vivement que la demande du Parlement thurgovien ne soit ni concrétisée, ni démultipliée dans d’autres cantons, a communiqué hier la CIIP. A défaut, elle se verrait contrainte d’appeler la Confédération à soutenir «le principe fondamental de l’apprentissage des langues nationales au degré primaire».
Le président de la CDIP, le Bâlois Christoph Eymann, a déjà réagi jeudi. Selon lui, les cantons doivent s’entendre pour éviter justement une intervention du Conseil fédéral. «Nous devons faire en sorte qu’un léger déséquilibre ne perturbe pas l’ensemble du système.»
Si les cantons ne trouvent aucun dénominateur commun, le Conseil fédéral pourrait intervenir conformément à la Constitution. Le conseiller fédéral Alain Berset avait annoncé en mars dernier vouloir faire le meilleur usage de cette compétence. «Il serait fâcheux que la Confédération doive intervenir», estime de son côté le président de la CDIP. La CDIP souhaite traiter la question des langues étrangères à l’automne prochain. Pour Christoph Eymann, il est clair que les langues nationales doivent jouer un rôle important. Dans un pays multilingue, il en va de la cohésion nationale.
Français remis en cause
A part Thurgovie, d’autres cantons alémaniques remettent en question l’enseignement du français à l’école primaire. Des interventions ont été déposées devant plusieurs parlements cantonaux. A Schaffhouse, le parlement a approuvé un postulat permettant de supprimer l’obligation d’enseigner deux langues étrangères à l’école primaire. A Nidwald, l’UDC a déposé en avril une initiative allant dans le même sens.
Une récolte de signatures est en cours dans le canton de Lucerne pour exiger également l’enseignement d’une seule langue étrangère au niveau primaire. Le PDC a aussi déposé une motion exigeant que les élèves en difficulté soient dispensés des cours de français.
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