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Religions

Le pape en semeur de paix à Bahreïn

Au Forum de Bahreïn, le pape a appelé les responsables religieux à s’engager à désamorcer les conflits


Camille Dalmas, Maurice Page iMedia/Cath.ch

Camille Dalmas, Maurice Page iMedia/Cath.ch

5 novembre 2022 à 02:01

Forum interreligieux » «Nous sommes toujours au bord d’un équilibre fragile et nous ne voulons pas sombrer», a déclaré le pape François en clôture du Forum de Bahreïn pour le Dialogue Orient et Occident pour la coexistence humaine, un rassemblement interreligieux organisé hier sur la place Al-Fida’ du Palais royal de Sakhir.

En présence de 1200 responsables religieux, dont le grand imam d’al-Azhar Ahmed al-Tayyeb et le patriarche de Constantinople, Bartholomée Ier, il a lancé un appel aux responsables religieux pour «s’engager» à désamorcer les conflits, dans un monde de plus en plus divisé, en s’efforçant «de se comprendre et de collaborer pour le bien de tous».

«Nous vivons une époque où l’humanité, connectée comme jamais auparavant, est beaucoup plus divisée qu’unie», a regretté le pape François, qui a une nouvelle fois lancé «un appel sincère à tous pour mettre fin à la guerre en Ukraine». Il a dénoncé l’action des puissants qui se «concentrent dans une lutte résolue pour des intérêts partisans, en exhumant des langages obsolètes, en redessinant des zones d’influence et des blocs opposés».

«Ramer ensemble»

«Dans le jardin de l’humanité, au lieu de soigner l’ensemble, on joue avec le feu avec des missiles et des bombes, avec des armes qui provoquent des pleurs et des morts, recouvrant la maison commune de cendres et de haine», a martelé le pape François. Il a fustigé les «visions despotiques, impérialistes, nationalistes et populistes» qui méprisent «le cri des gens ordinaires et la voix des pauvres».

A cette logique, le pape a opposé celle de «l’homme religieux», qui «dit non au blasphème de la guerre et à l’utilisation de la violence». «Il ne suffit pas de dire qu’une religion est pacifique, il faut condamner et désigner les violents qui abusent de son nom», a-t-il averti, critiquant l’instrumentalisation religieuse des conflits et réclamant une condamnation plus explicite du terrorisme.

Le pontife a plaidé pour une solidarité sans faille entre les religions. Cette alliance est selon lui dans l’intérêt de tous, «parce que dans un monde globalisé, c’est seulement en ramant ensemble que l’on avance, tandis que, naviguant seul, on va à la dérive».

Dans son discours, le pape s’est référé au Document sur la fraternité humaine signé avec le grand imam d’Al-Azhar à Abou Dhabi en 2019, en mettant en valeur trois axes à approfondir. Tout d’abord, «la prière, l’ouverture du cœur au Très-Haut, a expliqué le pape, est fondamentale pour nous purifier de l’égoïsme, de la fermeture, de l’autoréférence, du mensonge et de l’injustice».

Commentant la Déclaration du Royaume de Bahreïn, un texte publié en 2017 par le roi Hamad bin Isa Al Khalifa, qui appelle à la coexistence pacifique des religions, le pape a insisté sur la nécessité d’une «vraie liberté religieuse». Il a invité à une politique de tolérance ne se limitant pas au seul exercice du culte.

Le pape a souligné l’importance de l’éducation pour lutter contre les extrémismes et les fondamentalismes. Il a cité trois «urgences éducatives»: «la reconnaissance de la femme dans le domaine public, dans l’instruction, dans le travail, dans l’exercice de ses droits sociaux et politiques»; «la défense des droits fondamentaux des enfants», et enfin «l’éducation à la citoyenneté», en refusant toute notion juridique de «minorités» qui crée des citoyens de seconde zone sous prétexte de les protéger.

Appel du grand imam

Juste avant le pontife, le grand imam d’Al-Azhar avait lancé un important appel, invitant «avec un cœur aimant pour tous» ses «frères chiites» – qui sont notamment majoritaires à Bahreïn – à participer à une rencontre afin de dépasser leurs inimitiés. «Chassons ensemble tout discours de haine, de provocation et d’excommunication et mettons de côté les conflits anciens et modernes sous toutes leurs formes et avec toutes leurs ramifications négatives», a-t-il exhorté. Le sunnite a aussi lancé un appel à la fin de la guerre russo-ukrainienne «pour épargner la vie des innocents qui n’ont rien à voir avec cette violente tragédie». Il a invité les belligérants à «s’asseoir pour dialoguer et négocier».

Jeudi, dans un discours devant les autorités du pays réunies au palais d’al-Sakhir, le pape François avait condamné fermement la guerre au Yémen, un conflit où s’affrontent les puissances chiites et sunnites. Il a aussi plaidé pour le respect des Droits de l’homme alors que le royaume de Bahreïn est sous le feu des critiques d’ONG qui accusent le régime sunnite de discriminer la population chiite.

Après une rencontre œcuménique hier soir à la cathédrale Notre-Dame d’Arabie inaugurée en 2021, le pape célébrera ce samedi matin une messe au stade national. Son séjour à Bahreïn prendra fin dimanche.

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