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France. Assassinat de Samuel Paty: huit accusés devant la barre

Le procès de huit adultes accusés d’avoir contribué à la campagne de haine ayant conduit à l’assassinat de Samuel Paty s’est ouvert lundi devant la Cour d’assises spéciale de Paris. Ce professeur a été tué le 16 octobre 2020, à l’âge de 47 ans.

Francis Szpiner, avocat du fils de Samuel Paty, parle aux médias lundi devant la salle du procès où sept hommes et une femme sont jugés pour leur rôle dans l’assassinat en octobre 2020 du professeur d’histoire-géographie.KEYSTONE/EPA/CHRISTOPHE PETIT TESSON

ATS
AFP

ATS et AFP

4 novembre 2024 à 07:37, mis à jour à 16:12

Temps de lecture : 3 min

L’assassin, Abdoullakh Anzorov, un jeune islamiste radical russe de 18 ans d’origine tchétchène, bénéficiaire du statut de demandeur d’asile en France, est le grand absent du procès. Il a été tué par la police peu après avoir poignardé et décapité le professeur à Conflans-Sainte-Honorine, en région parisienne.

L’audience, très formelle, a débuté par la vérification de l’identité des accusés.

Deux jeunes amis de l’assaillant doivent répondre de «complicité d’assassinat terroriste», un crime passible de la réclusion criminelle à perpétuité. Les six autres accusés, dont trois sous contrôle judiciaire, comparaissent libres, sont jugés pour participation à une association de malfaiteurs terroriste criminelle, un crime passible de 30 ans de réclusion criminelle.

Mensonges relayés sur les réseaux sociaux

Parmi les accusés figure Brahim Chnina, Marocain de 52 ans, le père de la collégienne de 13 ans qui avait affirmé de façon mensongère - elle était absente au cours - que Samuel Paty avait demandé aux élèves musulmans de quitter sa classe avant de montrer des caricatures de Mahomet. Abdelhakim Sefrioui, militant islamiste franco-marocain de 65 ans, est aussi parmi les accusés.

Ces deux hommes, en détention provisoire depuis quatre ans, ont massivement relayé les mensonges de l’adolescente sur les réseaux sociaux dans le but, selon l’accusation, de «désigner une cible», «susciter un sentiment de haine» et «ainsi préparer plusieurs crimes». Ils sont tous deux accusés de participation à une association de malfaiteurs terroriste.

«On cherche à faire payer à Abdelhakim Sefrioui l’ensemble de son oeuvre militante» or «il ne connaissait pas l’auteur» de l’attaque et n’y a «pas participé», a affirmé avant l’audience l’un de ses avocats, Me Vincent Brengarth. «Il est nécessaire de résister à l’appel de l’opinion publique», a-t-il ajouté.

La fille de Brahim Chnina et cinq autres ex-collégiens ont été condamnés l’automne dernier à des peines allant de 14 mois avec sursis à deux ans dont six mois ferme à l’issue d’un procès à huis clos devant le tribunal pour enfants.

«Péril mortel»

Les deux amis d’Anzorov, Naïm Boudaoud, 22 ans, et le Russe d’origine tchétchène Azim Epsirkhanov, 23 ans, qui encourent la réclusion criminelle à perpétuité pour complicité d’assassinat terroriste, sont notamment accusés d’avoir accompagné Anzorov la veille de l’attentat dans une coutellerie de Rouen, localité à environ 130 kilomètres à l’ouest de Paris.

L’assassinat de Samuel Paty - survenu en plein procès des attentats du 7 janvier 2015 contre la rédaction de l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo - a constitué une onde de choc dans la société française.

«La mécanique tragique qui a abouti au martyre de Samuel Paty révèle la profondeur de l’entrisme islamiste en France et sa porosité avec le terrorisme. Son exposition en détail en audience publique doit non seulement aboutir à la condamnation sévère de ceux qui y ont concouru, mais aussi permettre une prise de conscience de notre société face à un péril mortel», souhaitent Thibault de Montbrial et Pauline Ragot, avocats de Mickaëlle Paty, une des soeurs du professeur assassiné.

Francis Szpiner, avocat d’autres membres de la famille de Samuel Paty, a souhaité «que la justice se montre à hauteur du crime qui a été commis, un fait inouï dans l’histoire de la République».

L’audience est présidée par Franck Zientara, un magistrat chevronné qui a notamment dirigé le procès de l’attentat de Saint-Etienne-du-Rouvray, l’assassinat d’un prêtre par deux islamistes radicaux près de Rouen en 2016.

Procès jusqu’au 20 décembre

Le procès sera aussi l’occasion d’évoquer la figure de Samuel Paty, un homme «esseulé, apeuré, aux abois», selon les magistrats instructeurs.

«Je suis menacé par des islamistes locaux», écrit-il à ses collègues le 10 octobre 2020, quatre jours après son cours sur la liberté d’expression. A aucun moment, l’enseignant menacé ne bénéficiera d’une protection policière.

Lui qui a l’habitude de rentrer chez lui à pied demande à des collègues de le raccompagner en voiture les quatre jours qui précèdent son assassinat. Sauf le 16 octobre, veille de vacances scolaires, où aucun enseignant motorisé n’est disponible.

Triste symbole du sentiment d’insécurité qui l’habitait, un marteau a été découvert dans son sac à dos après son assassinat.

Le procès est prévu jusqu’au 20 décembre.