La «Compagnie Dans le Ventre» de Rébecca Chaillon au Festival du Belluard
Le Festival du Belluard accueille vendredi soir la Compagnie Dans le Ventre de Rébecca Chaillon
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Elisabeth Haas
29 juin 2022 à 15:12
Fribourg » Le Festival du Belluard l’accueille à Fribourg vendredi avec le spectacle Carte noire nommée désir, puis ce sera tout bientôt au tour du Festival de la Cité, à Lausanne, avec Où la chèvre est attachée il faut qu’elle broute, spectacle sur le football au féminin. En attendant le festival La Bâtie à Genève puis, la saison prochaine, le Théâtre de Vidy et le TPR, notamment. Rébecca Chaillon était justement en résidence à La Chaux-de-Fonds pour Plutôt vomir que faillir au moment de l’interview. La comédienne, metteuse en scène et auteure française tourne beaucoup actuellement avec sa Compagnie Dans le Ventre. Et l’on n’a cité que les lieux suisses…
C’est nouveau pour vous, cet engouement pour votre travail?
Rébecca Chaillon: Je travaillais pour différentes compagnies. Maintenant, depuis trois ans, je travaille pour ma compagnie, mes spectacles, mes performances. C’est un bel engouement par rapport aux problématiques abordées.
Le féminisme porte de plus en plus, on parle des personnes LGBTQIA+, mais moins des personnes racisées. Vous êtes femme et noire, en quelque sorte doublement minorisée…
Bien sûr. Mais ce qui a été simplifié, pour moi, c’est de ne pas séparer les buts, de ne pas prioriser les combats, d’avoir plus d’outils sur les questions raciales et sociales et de les mettre en œuvre. Les questions raciales et sociales tiennent ensemble. C’est un enrichissement d’outils et de vocabulaire, qui permet de mettre des mots sur des situations.
De quoi souffrez-vous particulièrement en tant que femme noire?
Nous n’avons pas de modèles, de visibilité, il y a peu de récits qui s’expriment. Dans les médias, le cinéma, on ne montre que des personnes moches, sur lesquels on ne peut rien projeter, qui ne vivent pas d’histoires d’amour, qui sont dans des situations péjoratives. Il y a un travail de déconstruction qui est utile, qui n’est pas encore fini. Moi on m’invite, on me demande de parler, mais ce n’est pas le cas pour la grande majorité des femmes noires, qui n’ont pas les codes ou le temps pour s’informer, répondre, débattre. Il arrive aussi que nous nous retrouvions avec des personnes universalistes, pour lesquelles c’est O.K. d’aider les migrants, pour autant qu’ils restent dominés. On nous dit radicales, mais où est la radicalité? Dans les violences qu’on subit, ou dans le fait de les dénoncer? C’est n’est pas facile de prendre conscience des violences subies par beaucoup de femmes.
Je suis dans un milieu où je bénéficie du travail des autres, il y a plein d’artistes autour de moi, mais il n’y a pas de place pour tout le monde. On ne s’intéresse pas à plein de gens à contre-courant. J’ai peur d’être un alibi, qu’on se contente de n’inviter qu’une seule personne, alors qu’il y a énormément d’autres artistes. Je ne suis pas dans un endroit de grande souffrance, mais j’ai une frustration que nous ne soyons pas encore assez nombreuses. J’ai hâte de voir à des postes de direction des personnes de classes plus populaires. Et parfois je me perds, je parle plus de politique que de mes pièces. Je suis artiste, je dois pouvoir développer mon propos artistique.
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