Logo

Scènes

Théâtre. Dans les profondeurs de la mémoire: critique de la pièce Le Carpatie

Le titre fait référence au navire qui a porté secours aux naufragés du Titanic. Les représentations courent jusqu’à dimanche à Nuithonie.

Chady Abu-Nijmeh, Philippe Annoni, Délia Krayenbühl, Yann Philipona et Elsa Thebault sont dirigés par la metteuse en scène Sarah Eltschinger. © Nicolas Brodard

Elisabeth Haas

Elisabeth Haas

25 janvier 2024 à 02:05

Temps de lecture : 1 min

En mer, il faut avoir l’estomac bien accroché: quand le bateau tangue, sur le pont, il arrive qu’on perde pied. Dans la pièce Le Carpatie, à voir encore jusqu’au 28 janvier à Nuithonie, une insécurité guette, une menace plane, le danger est palpable. Au point que les cinq protagonistes ont moins l’air de faire partie d’un équipage que de faire bande à part. Chacun pour soi dans ce repaire inquiétant.

D’autant qu’un diable faustien ne cesse de trouver toutes les occasions de rappeler que la mort rôde, de mettre en exergue la finitude de chaque existence humaine. Les corps sont recroquevillés, les regards hagards, c’est une atmosphère de fin du monde. La scénographie est habillée du faisceau bleuté des spots, qui enveloppent la scène d’une ambiance sous-marine très graphique.

Apesanteur

Concrètement, le texte âpre tient davantage d’un long poème que d’un dialogue entre personnalités caractérisées. Traduit et adapté d’une pièce de l’auteur ukrainien Maxim Kourotchkine, il puise dans ces profondeurs, traverse ou plutôt va et vient entre différentes couches (de sens, de références, de réalités). On passe de l’une à l’autre sans toujours réussir à tirer le fil. Il y a même plusieurs temporalités, qui ne sont pas linéaires. L’auteur convoque d’ailleurs largement la mémoire et sa manière de réécrire sans cesse le passé, voire de ressasser parfois les mêmes événements qui affleurent à la surface.

C’est peu dire qu’il est difficile de se tenir à la barre, que c’est très exigeant de se repérer dans les méandres de la mémoire humaine, fragile tout en étant un appui indispensable pour se construire un avenir, fondamentalement lacunaire tout en étant nécessaire pour se créer une unité. Il semble que le huis clos scénique est une image de la société entière. Sans la mémoire, la vie est un naufrage.

Ce contenu provient de notre ancien site web. Il est possible que sa mise en page ne soit pas idéale. En savoir plus

Dans la même rubrique

Scènes

Théâtre. Une pièce qui éprouve l’exercice du pouvoir

Comment un syndic écologiste peut-il décider seul du déploiement des antennes 5G dans sa commune? La pièce Coupures questionne ce vendredi «la place que le public occupe, ou plutôt celle qu’il n’occupe pas, dans le débat démocratique», selon le Bicubic, qui l’accueille.