A une minute du désastre
Courage, lâcheté et trahisons, autant de ressorts politiques qui font la joie des créateurs de fiction. David Dufresne, l’auteur de 19 h 59, abonde
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Aurélie Lebreau
31 mars 2022 à 19:42
Politique-fiction » C’est un court roman – une fable même, comme le qualifie son auteur, David Dufresne –, sombre et nerveux. Un thriller griffant le politique autant que le médiatique, et révélant surtout les souffrances d’une société française aux extrêmes devenus très violents. Dans19h59, le patron de la chaîne (putassière) d’information en continu Rex News, Philippe Rex (qui fait penser à Vincent Bolloré), se fait enlever neuf jours avant le second tour de l’élection présidentielle 2022. Rémi Bourg, un suprémaciste blanc, survivaliste, qui a combattu aux côtés des Russes durant la guerre du Donbass, est l’auteur de ce rapt, une action voulue comme un déclencheur pour «mettre en place un monde de l’Apartheid». Achevé en fin d’année dernière, ce roman glace par son sens de l’actualité – on pense bien sûr à la guerre en Ukraine – mais aussi par ses terrifiantes descriptions des coulisses de Rex News, une chaîne dont le but n’est plus d’informer, mais de faire ressentir les choses. «Ce n’est pas informer qu’il faut, c’est submerger. (…) 2022 sonnait le triomphe de la télé-politique», assène Philippe Rex. Sur une terrasse parisienne pluvieuse, David Dufresne, l’auteur de 19h59, détaille la genèse de son second roman.
L’élection présidentielle représente-t-elle, en fiction, le moment parfait pour dire la société française?
David Dufresne: Absolument! C’est même un genre en soi, la politique-fiction. Genre auquel je ne pensais pas quand j’ai commencé 19h59. Et pourtant mon roman s’inscrit dans ce registre… L’élection est un moment de vérité, et la littérature a évidemment à voir avec la vérité et le mensonge. En Suisse, vous ne possédez pas de monarque républicain et vous votez bien plus souvent que nous. Ici, le moment de l’élection présidentielle est très ritualisé. Et, avec le temps, force est de constater que ce moment est de plus en plus spectaculaire, dans le pire sens du terme.
Peut-on qualifier votre ouvrage qui se déroule dans un futur très proche, soit l’entre-deux-tours de l’élection qui débutera dans une semaine, de dystopique, car tout part dans les décors?
Plus qu’une dystopie, je le qualifierais de fable augmentée. La fable, on ne croit pas nécessairement que l’histoire soit vraie et pourtant on en tire des enseignements sérieux. La littérature permet, si elle le souhaite, de devancer le réel. C’est ce qui m’intéresse. Et aussi parce que c’est un exercice compliqué. Le monde actuel est une fournaise et l’on peut se brûler en collant trop à l’actualité…
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