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Culture

A Photo Elysée, l’Amazonie en couleurs de feu

Au cœur du nouvel accrochage de Photo Elysée, l’Amazonie agonise en couleurs de braise sous le regard esthétisant de Richard Mosse.

Dans l’Etat brésilien du Roraima, image tirée de la vidéo Broken Spectre, tournée avec une caméra aérienne multispectrale qui rend visible l’invisible. © Richard Mosse

Thierry Raboud

Thierry Raboud

24 novembre 2023 à 16:45

Temps de lecture : 1 min

Lausanne » C’est comment, un poumon qui brûle? Dramatique, métaphorique – forcément à couper le souffle. L’Amazonie, haut lieu de notre respiration planétaire, est de toute splendeur puis de sciure et de suie, dans ce monumental paysage vidéo déployé par l’artiste Richard Mosse au cœur du nouvel accrochage de Photo Elysée, sur le site de Plateforme10 à Lausanne.

Une programmation d’hiver regroupant des expositions très diverses, du patrimonial au contemporain et du local à l’international, mais que semble rapprocher une même inclination au fragile, à la mise en forme de ce qui, sans le salut d’un regard, menacerait de disparaître dans l’orbite de notre indifférence. Pour cela, revivifier l’art de l’image, sortir du cadre, pousser la photographie hors de sa définition: voilà aussi de quel geste procèdent ces ensembles d’œuvres.

Désirs et mélancolie

Ainsi, c’est en empruntant aux codes de l’installation que la photographe lausannoise Virginie Otth propose dans une grande salle un riche aperçu de sa pratique. Contre un mur, de Multiples désirs portés, en une variété de formes, textures et esthétiques, sur le corps des hommes aimés. Inversant le male gaze en un kaléidoscope allant du noir-blanc à la saturation de couleurs, elle donne chair à un regard pluriel, tendre et intime, qu’elle pose également sur les petits riens ordinaires dans Quotidiennetés, répertoire du trivial. Et au centre de la pièce, de grands cartons dépliés font sculpture, cabanes précaires imprimées de cette végétation que notre manie consumériste ne cesse de renier, sinon de consumer.

Fragile aussi, renversant également le regard, l’œuvre de Deborah Turbeville (1932-2013), longtemps invisibilisée par une histoire de la photographie écrite au masculin, est à redécouvrir dans une vaste rétrospective posthume. Alors que cette Américaine est avant tout connue pour ses photographies de mode, elle a laissé un riche fonds d’œuvres singulières, comme saisies dans le hors-champ des shootings où ses modèles apparaissent en suspension mélancolique, sur des clichés brumeux agencés en collages sur papier kraft. «Lorsque nous avons ouvert pour la première fois ses cartons d’archives, c’était une vraie découverte! C’est tout un pan expérimental de son travail qui revient en lumière, où son langage photographique prend des formes inattendues, atemporelles et artisanales», admire Nathalie Herschdorfer, directrice de l’institution.

Tout aussi inattendu dans sa manière d’interroger ce que photographie veut dire, le travail présenté par Mathieu Bernard-Reymond, qui a confié à l’intelligence artificielle le soin de créer des images à partir de citations de Ramuz. «Un beau soleil était sur la montagne aux plaques de rochers qui brillaient comme des miroirs, et les toits de bardeaux semblaient d’argent dans l’air léger», et c’est un tableau abstrait d’à-plats scintillants et minéraux que génère la machine, dans ce très beau projet présenté également à La Muette, à Pully.

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