Justice, France. Sarkozy définitivement condamné à un an sous bracelet
L'ancien président français Nicolas Sarkozy a été définitivement condamné mercredi à un an ferme sous bracelet électronique pour corruption et trafic d'influence. Il affirme ne pas être "décidé à accepter cette injustice profonde", invoquant une "parfaite innocence".
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ATS et AFP
Aujourd’hui à 14:09, mis à jour à 16:52
La plus haute juridiction de l'ordre judiciaire français a rejeté mercredi le pourvoi de l'ancien président, rendant définitive sa condamnation à un an de prison ferme sous bracelet électronique dans l'affaire dite des "écoutes" pour corruption et trafic d'influence, une sanction inédite pour un ancien président en France.
Jusqu'ici suspendue, cette peine, à laquelle s'ajoutent trois ans d'inéligibilité, est désormais applicable: M. Sarkozy, 69 ans, va être convoqué devant un juge de l'application des peines qui devra déterminer les modalités de son bracelet électronique.
Saisine de la CEDH
"Je ne suis pas décidé à accepter l'injustice profonde qui m'est faite", a réagi sur X l'ancien chef de l'Etat, qui a saisi la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), convaincu de "demeurer dans son bon droit" et affirmant vouloir "redire (sa) parfaite innocence".
Cette saisine de la CEDH n'empêche pas l'exécution des sanctions prononcées.
"J'assumerai mes responsabilités et ferai face à toutes ses conséquences", a aussi déclaré l'ex-président.
"Le recours que je forme devant la CEDH pourra conduire hélas à faire condamner la France", souligne Nicolas Sarkozy, estimant qu'il n'aurait pas saisi cette instance s'il avait "bénéficié d'une analyse juridique sereine".
Nicolas Sarkozy doit désormais être convoqué - en principe dans un délai inférieur à un mois - devant un juge de l'application des peines (JAP) en France, qui fixera les modalités de son bracelet, posé ultérieurement.
Cette décision intervient alors que l'ancien locataire de l'Élysée doit comparaître à partir du 6 janvier, et pour quatre mois, au tribunal de Paris, dans l'affaire des soupçons de financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007.
Dans le dossier tranché mercredi, Nicolas Sarkozy a été condamné en première instance le 1er mars 2021, puis en appel le 17 mai 2023.
L'ex-chef de l'Etat a été à chaque fois reconnu coupable d'avoir noué en 2014, au côté de son avocat historique Thierry Herzog, un "pacte de corruption" avec Gilbert Azibert, haut magistrat à la Cour de cassation. Et ce, en échange d'un "coup de pouce" promis à ce dernier pour un poste honorifique à Monaco.
L'objectif: que M. Azibert transmette des informations et tente d'influer sur un recours formé par Nicolas Sarkozy dans l'affaire Bettencourt - une affaire des dons octroyés au parti de droite UMP par la richissime héritière du groupe L'Oréal Liliane Bettencourt (décédée en 2017) et dans laquelle la justice a depuis abandonné les poursuites.
MM. Sarkozy, Azibert et Herzog se sont vu infliger la même peine, avec pour l'avocat une interdiction de porter la robe noire pendant trois ans.
"Atteintes aux droits"
Clamant leur innocence depuis l'origine, ils ont formé des pourvois, soulevant 20 arguments examinés lors d'une audience le 6 novembre, à l'issue de laquelle la décision a été mise en délibéré jusqu'à ce mercredi.
Devant la Cour de cassation, qui contrôle la bonne application du droit et non le fond des dossiers, l'avocate générale avait méthodiquement préconisé le rejet de chaque point de droit soulevé.
Me Emmanuel Piwnica, avocat au conseil de Thierry Herzog, avait lui fustigé une procédure qui "n'aurait jamais dû voir le jour", parlant d'un dossier où "on ne compte plus les illégalités commises, les manquements, les atteintes aux droits fondamentaux".
Les avocats contestaient notamment la légalité des écoutes au coeur du dossier, un sujet déjà maintes fois débattu dans cette affaire.
Me Patrice Spinosi, avocat de l'ancien président, avait invoqué un arrêt de la CEDH du 16 juin 2016: "Nicolas Sarkozy ne peut pas être pénalement condamné sur le fondement d'échanges qu'il a eus avec son avocat" car ils ne peuvent pas être "utilisés contre lui", a-t-il argué.
En 2025, la Cour de cassation devra en outre trancher sur le pourvoi de Nicolas Sarkozy contre sa condamnation à un an de prison dont six mois ferme, pour des dépenses excessives lors de sa campagne pour l'élection présidentielle perdue de 2012.