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Federer sait où il va. objectif Londres

Le Bâlois de 39 ans a décidé de se retirer de Roland-Garros pour mieux se préserver pour Wimbledon


 Pierre Salinas

Pierre Salinas

7 juin 2021 à 04:01

Tennis » Il était 0 h 43, samedi soir ou dimanche matin, selon que l’on soit couche-tard ou lève-tôt, quand Roger Federer (ATP 8) a achevé son pensum. Dans la noirceur de Roland-Garros, devant les tribunes désespérément vides – couvre-feu oblige – du court Philippe-Chatrier, sur une terre battue rendue lourde par la fraîcheur et l’humidité ambiantes et face à un Dominik Koepfer (ATP 57) qui lui a rendu coup pour coup, l’homme aux 20 titres du grand chelem a souffert trois heures et demie durant. Et pourtant…

Pourtant, à bientôt 40 ans, le Bâlois s’est accroché comme un enfant s’accroche à sa première raquette. Il a râlé, pesté et exhumé des «komm jetzt (littéralement: allez maintenant!)» qu’on ne lui avait jamais autant entendu prononcer que depuis ses retours avortés à la compétition, en mars à Doha puis il y a trois semaines à Genève. Au bout de la nuit, une récompense comme tombée du ciel: un succès 7-6 6-7 7-6 7-5 synonyme de qualification pour les 8es de finales, où il était censé affronter aujourd’hui Matteo Berrettini (ATP 9).

D’opposition de style entre le maestro suisse et le cogneur italien, il n’y aura pas. Hier après-midi en effet, Roger Federer a entériné ce qu’il avait déjà laissé entendre en conférence de presse, à sa sortie du terrain: sa quinzaine parisienne s’arrête là, à l’aube de la deuxième semaine. «J’ai décidé de me retirer après avoir mené des discussions avec mon staff. Après deux opérations au genou et plus d’une année de rééducation, il est important que j’écoute mon corps et que je ne me précipite pas dans ce retour à la compétition», explique-t-il, cité dans un communiqué de la fédération française. Les raisons de son forfait tombent sous le sens. A 21 jours du début de Wimbledon, qui est l’objectif avec un grand «o» de sa saison, sinon le dernier de sa carrière, à quoi bon prendre le risque de se «brûler», sachant que les chances de soulever la Coupe des mousquetaires dimanche prochain sont infimes? Pour Roger Federer, la décision a été d’autant plus facile à prendre que les trois matches remportés Porte d’Auteuil, contre Istomin, Cilic et Koepfer, lui ont apporté des informations qu’il estime suffisantes.

1. L’envie est plus que jamais présente

«Voir Federer, avec ses 39 ans et 2 opérations du genou, renverser un match à minuit passé dans un stade vide est pour moi une source d’inspiration.» Le tweet est signé Andy Murray, ancien No 1 mondial qui, comme le Bâlois, mais pour des motifs plus graves encore (prothèse de la hanche), n’a pas échappé au bistouri. A lire son «gazouillis» entre les lignes, le joueur écossais se demande s’il aurait eu le même courage que son aîné. Qu’est-ce qui pousse «Rodgeur» à s’accrocher malgré le poids des ans? Au micro de Marion Bartoli, à même le court, Roger Federer a donné la réponse qu’il donne toujours: «Je ne sais pas jusqu’à quand je vais le faire, mais j’adore jouer au tennis.»

2. Les coups n’ont pas disparu non plus

Une première balle toujours efficace, malgré un déficit de puissance notable, vis-à-vis des plus gros serveurs pour le moins. Un revers qu’il s’est efforcé, par défi peut-être, de «slicer» le moins souvent possible, quand il a fallu le frapper à hauteur d’épaule aussi. Un coup droit claqué ou bondissant, véritable baromètre de son jeu, et, toujours, cette capacité unique à faire des merveilles au filet. «On l’a vu un peu en difficulté sur son côté revers, mais c’est l’histoire de Roger sur terre battue: tout le monde essaie de jouer haut sur ce côté-là. Pour le reste, je n’ai pas vu de problème technique. Je n’ai d’ailleurs jamais eu de doute à ce sujet. Même à 80 ans, son bras sera le même», rigole Claudio Mezzadri, 26e mondial en 1987 et premier capitaine de Roger Federer en Coupe Davis.

3. Un corps qui tient le choc

S’est-il réveillé avec des douleurs, une gêne? Est-il blessé ou ne veut-il pas prendre le risque de le faire? L’option No 2 a notre préférence, mais personne à part lui et son équipe ne sait vraiment dans quel état physique Roger Federer se trouve aujourd’hui. «Depuis son retour, il n’a jamais été question de toucher de balle, de revers ou de coup droit, mais de résistance et de récupération», rappelle Claudio Mezzadri avant d’ajouter: «Quand tu gagnes après 3 h 30 d’un dur combat, c’est que ton corps tient le choc. Mais il ne faut pas oublier que Roger est en reconstruction. Il apprend en quelque sorte à redevenir un joueur du Circuit et retrouver le rythme de la compétition exige du temps.»

En aura-t-il suffisamment pour être prêt pour Wimbledon le 28 juin? «S’il a choisi de se retirer de Roland-Garros, c’est parce que Halle (tournoi sur gazon avant Wimbledon, ndlr), où il voudra aller loin, commence lundi prochain déjà, reprend Claudio Mezzadri. Pour moi, l’idéal aurait été de cumuler dix matches non pas sur six mois mais sur deux ou trois tournois. Mais entre son niveau de Genève et ce qu’il a montré à Roland-Garros, il y a un gouffre. En trois semaines, il peut encore beaucoup progresser. On parle de Roger Federer, ne l’oublions pas.» Roger Federer sait où il en est. Il sait surtout où il va.

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