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Tennis

Delémont, une ville qui lui ressemble

Qualifié pour le 3e tour en double, le Français Pierre-Hugues Herbert réside depuis cinq ans dans le Jura


 Pierre Salinas

Pierre Salinas

5 juin 2021 à 04:01

Roland-Garros » Ancien N° 2 mondial, il a remporté les quatre tournois du grand chelem ainsi que le Masters. En double. Parce qu’il n’a pas la renommée ni le charisme d’un Jo-Wilfried – mangez des «Kinder Bueno» – Tsonga ou d’un Gaël – buvez du lait – Monfils, pour ne citer que deux parmi les nombreux joueurs français à s’être expatriés en Suisse, il peut se balader dans les rues de sa ville d’adoption sans risque d’être importuné. «Je n’ai pas fait de pubs qui passent à la télé, c’est pourquoi seuls les vrais amateurs de tennis me reconnaissent», rigole-t-il au bout du fil.

Né à Schiltigheim, en Alsace, le 18 mars 1991, Pierre-Hugues Herbert réside dans le Jura depuis cinq ans. A Develier d’abord, puis à Delémont, où il a «posé» ses papiers en 2017. Le matricule 85 au classement mondial l’avoue sans la moindre gêne: les raisons de son expatriation sont aussi fiscales. Mais elles sont avant tout familiales, sa sœur aînée vivant (et travaillant) dans le canton depuis plus longtemps que lui encore. «Helvète d’adoption (sic)» il est et le revendique, Français amoureux des courts en terre battue de Roland-Garros il restera. Toujours. Eliminé lundi en simple, Pierre-Hugues Herbert – P2H pour la presse tricolore – s’est qualifié hier pour le troisième tour du tableau de double (victoire 6-3 3-6 7-5 face à la paire Harris/Erlich), qu’il dispute aux côtés de Nicolas Mahut, le partenaire de ses plus beaux exploits.

Le paradis

C’est en train que Pierre-Hugues Herbert a rallié Paris, où il est arrivé il y a une semaine jour pour jour. «Depuis le Jura, c’est facile», lâche celui qui a profité de l’arrêt du circuit ATP au printemps 2020 pour mieux découvrir sa terre d’accueil. «Pendant l’entier du confinement, je suis resté à Delémont, commence le jeune père de famille. Ma fiancée était enceinte et, ensemble, nous avons pris le temps de souffler et préparer notre vie à trois. Pour me maintenir en forme, je me suis acheté un VTT et suis parti sillonner la région de fond en comble. Chaque jour un nouveau coin. C’était le paradis.»

A Pierre-Hugues Herbert, l’air jurassien permet de se ressourcer. «Nous, tennismen, sommes des privilégiés, poursuit-il. Mais nous sommes sans cesse entre deux avions ou à courir après des résultats, qui viennent ou qui ne viennent pas, et notre quotidien n’en est que plus stressant. Quand je rentre à la maison, c’est pour me reposer et recharger les batteries. Au calme. Les gens sont si bienveillants!»

A Bienne avec Stricker

Roger Federer (ATP 8) à Dubai, Novak Djokovic (ATP 1), Daniil Medvedev (ATP 2) et Alexander Zverev (ATP 6) à Monte-Carlo, Rafael Nadal (ATP 3) à Manacor, où il a bâti sa propre académie: où qu’ils soient établis, les meilleurs jouissent des infrastructures les plus modernes. Et Pierre-Hugues Herbert, comment fait-il? «Pour le travail foncier, j’ai déniché une super salle à Delémont, précise le Français. Et pour le tennis, je me rends souvent au centre de Swiss Tennis à Bienne, qui est à 35 minutes en voiture de chez moi. Là-bas, je me suis par exemple beaucoup entraîné avec Dominic Stricker, qui pointe le bout de son nez, et d’autres jeunes Suisses tels que Leandro Riedo ou Jakub Paul. Je profite d’eux et ils profitent de moi: c’est donnant-donnant. Je joue aussi avec Stan (Wawrinka) ou Jo (Tsonga) à Nyon. Mais c’est 2 heures de route quand même…»

Un pari

Delémont n’a pas les charmes de La Côte vaudoise ou de Genève la cosmopolite. Mais sur les bords de la Sorne, Pierre-Hugues Herbert a trouvé une quiétude et une simplicité qui lui ressemblent. «Aujourd’hui, raconte-t-il de sa douce voix, je ne suis pas à plaindre. Mais il faut savoir que je suis issu d’une famille modeste, qui s’est entre guillemets sacrifiée pour mettre toutes les chances de mon côté. Mes parents étaient tous deux professeurs de tennis. Quand j’avais 13 ans, et alors que je ne comptais même pas parmi les meilleurs Français de ma catégorie, mon père a décidé de ne plus se consacrer qu’à moi. Il était de ceux qui pensaient que les voyages forment la jeunesse et nous sommes partis très tôt à travers le monde. Ma mère, elle, a changé de profession pour percevoir un meilleur salaire. Les attentes autour de moi étaient grandes, et c’était pour moi beaucoup de pression.»

Pierre-Hugues Herbert, qui a grimpé jusqu’à la 36e place à l’ATP en février 2019 avant de rentrer quelque peu dans le rang, est un pari. Le Jura son antistress.

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