Logo

Page jeunes

Vaincre le marasme avec Amalia

L’article en ligne – BD »  Amalia, signé chez Dargaud par la dessinatrice française Aude Picault, aborde les thématiques de l’éco-anxiété et de la détresse mentale.


Franck Descloux

Franck Descloux

30 janvier 2022 à 12:40

La bande-dessinée d’Aude Picault, « Amalia » débute  avec la présentation d’une famille recomposée. Karim et Amalia, employés respectivement dans une fabrique de pains et dans une entreprise de gestion de risques  environnementaux, élèvent deux filles. La première, Nora, est lycéenne et influenceuse sur les réseaux sociaux à ses heures perdues et Lili, la deuxième, commence à peine l’école maternelle.

On ressent immédiatement une certaine angoisse lorsqu’on tourne les premières pages de la BD, car le monde dans lequel Amalia évolue ressemble étonnamment au nôtre. Porutant, bien que les illustrations de l’auteure inspirent un certain calme grâce à l’emploi de couleurs épurées, la dessinatrice croque à merveille le monde de l’entreprise, où la productivité des employés est poussée à son maximum. Amalia arrive de moins en moins à suivre les innovations technologiques que lui impose son entreprise. Elle peine également à se ressourcer sur son temps libre, prise en étau entre les caractères bien trempés de Karim et de Nora. Finalement, le monde dans lequel évolue la petite famille ressemble beaucoup à celui dans lequel nous vivons.

De nouvelles préoccupations importantes
La bande dessinée d’Aude Picault est touchante et singulière car elle met en exergue de nouvelles problématiques que l’on peut rencontrer dans la vie mais peu discutées. Il est question d’éco-anxiété, un mal-être que chacun et chacune peut ressentir face aux désastres environnementaux en cours.
Amalia pense par exemple bien faire en triant ses déchets et en sensibilisant son entourage aux problèmes écologiques. Son ami Karim lui fait savoir qu’il en a assez de ses « leçons de morale » et face à l’immensité des catastrophes écologiques qui se déroulent en parallèle de sa vie, Amalia apparaît bien démunie. Subsiste alors un sentiment de surplace, qui n’aide pas au bonheur de la principale figure de l’album et que l’auteure met en avant avec brio.

Le sentiment de perdre pied évolue également alors que Karim, Nora et Amalia ne maîtrisent plus leurs vies professionnelles. Le premier est consterné d’apprendre que le blé, l’ingrédient quasi-indispensable de la fabrique de pains où il travaille, est contaminé aux pesticides. Les relations se tendent avec sa fille Nora dans le même temps. Cette dernière, obnubilée par les réseaux sociaux, en oublie ses études et ne se rend compte que tardivement de sa situation d’échec scolaire. Amalia se voit prescrire des jours d’arrêt de travail ; elle s’est effondrée de fatigue en pleine visioconférence.

Une invitation à prendre le temps
Face à des situations toutes plus difficiles les unes que les autres, la petite famille décide de passer quelques jours dans une minuscule maison à la campagne. Amalia espère s’y ressourcer alors que Karim et Nora ont enfin une franche discussion qui leur permet de repartir sur de meilleures bases relationnelles.
Les jours passent et la peur de revoir surgir leurs quotidiens mentalement néfastes se fait de plus en plus présente. Le dernier soir, Karim goûte un pain qu’il trouve somptueux chez l’hôte qui les accueille. Cette dernière lui répond que ce pain est si bon, en partie grâce au temps qu’il a fallu pour le fabriquer. Ce mot va agir comme un révélateur pour l’ensemble de la famille. Ils décident de prendre le « temps » de fabriquer, ensemble, du pain de qualité et de recréer un lien familial sain et durable.

L’album d’Aude Picault agit en quelque sorte comme un reflet de nos vies souvent effrénées et fatigantes dans lequel des milliers de familles peuvent se reconnaître. De l’évaluation permanente de moindres faits et gestes à la demande perpétuelle de rendement, l’auteure permet aux lecteurs de se rendre de lourds problèmes qui peuvent miner le mental de tout un chacun.
Seulement, la prouesse de cette bande-dessinée réside dans la désignation d’un autre chemin, plus désirable, où l’on « prend le temps » de réfléchir, d’agir et de consommer autrement. Est-ce dont cela, la clé pour imaginer des lendemains plus heureux ?


Fiche technique

Titre: Amalia
Auteure: Aude Picault (scénario, dessins, couleurs)
Public: tous publics
Parution: 21.01.2022
Collection: hors collection Dargaud
Nombre de pages: 148 pages
 

Ce contenu provient de notre ancien site web. Il est possible que sa mise en page ne soit pas idéale. En savoir plus