Vaillantes, hymne à l'amour ?

Ce livre dévoile quatre femmes sortant des études et s'interrogeant : que faire après ? maintenant ? qui suis-je ? Lila lutte pour ses idéaux, Marine ignore quel métier choisir, Jade étouffe sous le poids du quotidien et Rose rêve d'écrire. Quatre images pour exprimer la Femme, avec son grand F et ses milles particularités et contradictions. Pour se projeter, le temps d'une lecture, dans quelques fragments d'existence.
Lila est la voix de la révolte, celle qui veut exploser les idées que la société nous injecte. Pourquoi se raser ? se maquiller ? Des réflexions nécessaires présentées dans tout leur paradoxe. Marine représente la frontière de la vie adulte et les doutes qui la bordent. Quel sera mon travail ? Celui de vivre l'instant présent, répond-elle, en nous donnant une jolie leçon. Jade est l'incarnation du monde du travail. Débordée, anxieuse, elle est rattrapée par des soucis enfouis. Dans un système qui prône le profit et la performance, comment régler nos problèmes sans temps, ni énergie ? Finalement, Rose est le lien. Celle qui veut raconter, questionner. Car écrire, c'est offrir des mots d'amour et de confiance. Car écrire, c'est combler les vides, c'est réparer.
« Mais elles savent que peu importe la route sur laquelle elles se trouvent, il y aura toujours une aire de repos, un joli coin de pique-nique, un point de vue, un fameux café, où elles pourront se retrouver, s’accompagner sur quelques pas, et […] côte à côte, cheminer. »

Noémie Moulin, une rencontre clé

L’image de l'écriture portée par Rose, c'est celle de son autrice, la valaisanne de 27 ans Noémie Moulin : « Je n'ai pas voulu produire un livre. L'écriture est mon processus d'extériorisation », explique-t-elle. « Ce livre m'a permis d'exprimer des événements que je voulais sortir. J'ai donc créé quatre personnages et leur ai donné ce vécu. Une fois les protagonistes dessinées, j'ai choisi de les faire cheminer pour créer une histoire ». Noémie Moulin a ensuite arrosé ce projet, jusqu'à l'envoyer à Torticolis et Frères qui décide de le publier. 
En sort un livre original qui parle de féminisme, d'amitié, de confiance en soi : « J'avais besoin de parler de ces sujets, car je ne les retrouvais jamais de la manière dont je les ressentais », développe-t-elle. Désireuse de les montrer sous une forme lui correspondant, Noémie choisit de les imbriquer dans son récit, sans les développer en profondeur : « j'ai l'impression que c'est ainsi qu'ils sont vécus à nos âges. On évolue dans notre quotidien et ils nous traversent sans que l'on trouve de solution. Sinon, on cesserait d'en parler ». De cette vie qui nous touche puis reprend son cours en nous habitant, elle brosse un portrait sensible. État des lieux plus que prise de position. 
L’utilisation de l’écriture inclusive est particulièrement originale. Noémie explique : « Durant mes études en travail social, j'ai découvert ce procédé. Alors que des élèves disaient qu'il était compliqué à appliquer, je l'ai rapidement intégré. Le cerveau s'adapte vite, jusqu'à ne plus rien percevoir. Alors, je me suis questionnée sur sa validité dans un texte littéraire ». Et celui-ci s'avère bien fonctionner, car son lectorat n'en a que peu souligné l'utilisation. Il est intéressant de découvrir un texte présentant une égalité orthographique.
Toutefois, Noémie Moulin se questionne : « Si je devais réécrire Vaillantes, je choisirai un redoublement du masculin et féminin et un usage épicène avec un accord de proximité ». En effet, en travaillant avec des personnes malvoyantes, Noémie a constaté la difficulté pour celles-ci à percevoir le point médian. Nouvelle épreuve pour l'écriture inclusive ? La réflexion est ouverte et mérite d'être approfondie. 
Finalement, Vaillantes est un texte qui réconforte un lectorat assailli des doutes de fin d'études ou de questionnements sur la société patriarcale. « Vous n'êtes pas seul·e·s ! », crient Rose, Jade, Marine et Lila. Mais ce rugissement ne s'arrête pas là, car Noémie Moulin l'a également porté sur les planches avec une pièce de théâtre, La Cour des Grandes, qui sera jouée au Teatro Comico, à Sion, du 28 au 30 avril et du 5 au 7 mai 2022. Elle y raconte le quotidien de cinq colocataires, interprétées par ses amies et sa sœur. Elle explique : « Il faut redonner ses lettres de noblesse à l'amateurisme et arrêter de penser qu'il faut avoir un papier pour créer. On est légitimes aussitôt que l'on a des choses à exprimer ». Écrire, rire, partager, vivre. Merci Noémie !