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Un cheveu dans la soupe

Brice Rebetez et Arnaud Meyer sont adeptes des dreadlocks. Témoignages.

La coupe de cheveux fait souvent l’objet d’interprétations sociales stéréotypées.

 Rémi Alt

Rémi Alt

20 décembre 2021 à 02:01

Temps de lecture : 1 min

Société » «C’est une façon d’être, de vivre! Ça nous différencie sur le plan de la clairvoyance et nous confère une base de positivité et de calme», commence Arnaud Meyer, 20 ans, lorsqu’on lui demande ce que représentent pour lui ses dreadlocks. De son point de vue, cette coiffure originale véhicule un certain nombre de valeurs portées généralement par des personnes typées africaines. Il précise qu’elle se démocratise de plus en plus.

Ce jeune apprenti installateur électricien a vécu lors de son recrutement militaire une expérience qui, de son point de vue, était purement liée à son apparence: «Tout se passait bien jusqu’au moment où j’ai dû passer devant le psychologue. Je me suis senti réduit à un préjugé et j’ai été refusé, raconte Arnaud Meyer. A ce moment-là, je devais prendre des médicaments qui me provoquaient des crises d’angoisse et je fumais de temps en temps du cannabis pour me calmer. Ça a été la justification de leur refus», affirme-t-il en insistant sur le regard pesant de l’administration.

Idées fausses

Brice Rebetez, apprenti cuisinier de 18 ans lui aussi adepte de dreads, soutient également qu’il subit ce regard trop souvent. Pour sa part, il estime avoir été discriminé alors qu’il avait postulé pour un stage: «J’ai d’abord envoyé un CV avec une photo de moi et on m’a répondu qu’il n’y avait pas de place. Quelques semaines plus tard, j’ai renvoyé un CV, sans photo cette fois-ci, et j’ai été engagé pour le stage», explique-t-il.

« C’est en parlant avec les gens qu’ils se rendent compte que leurs idées reçues sont fausses »

Ces deux jeunes sont régulièrement confrontés à des préjugés qu’ils abordent avec recul: «En soi, c’est de l’ignorance, et on ne peut pas en vouloir aux gens ignorants, relève Arnaud. La meilleure solution, c’est le dialogue. C’est en parlant avec les gens qu’ils se rendent compte que leurs idées reçues sont fausses», complète-t-il, tandis que Brice confirme ses propos.

« Souvent, on ne retient que les signes stéréotypés alors que le jeune lui-même ne se réduit pas à ça. »

Pour Fabrice Plomb, maître d’enseignement et de recherche en sociologie à l’Université de Fribourg et conseiller socioprofessionnel, on peut voir une essentialisation dans l’approche des dreadlocks: «Souvent, on ne retient que les signes stéréotypés alors que le jeune lui-même ne se réduit pas à ça.» Il ajoute que les critères à appliquer lors d’une évaluation à distance, comme c’est le cas avec un CV, ne sont pas les mêmes que lors d’un entretien. «Avec la photo, forcément, en plus de la question des compétences et du parcours, il y a des catégories de jugements sociaux habituels qui entrent en jeu, positivement ou négativement», souligne l’enseignant. Il rappelle aussi que l’absence de cheveux a longtemps été une manière d’uniformiser les recrues dans l’armée. «C’est intéressant de constater que le sens qui est donné à un certain nombre de pratiques est différent voire opposé selon qu’il est vu par les adeptes ou par des institutions», conclut-il.

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