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Vaud

«Un enfant vaut-il moins qu'un canari?»

Enseignement • A la veille de la rentrée scolaire, le Syndicat des enseignants romands (SER) dénonce une formation «à la traîne» des enseignants. Il demande à la Conférence intercantonale de l'instruction publique (CIIP) l'organisation d'Etats généraux sur le sujet.

«Un vétérinaire fait beaucoup plus d'études (dix semestres) qu'un enseignant. Un enfant vaut-il moins qu'un canari?» s'interroge le secrétaire général du SER Jean-Marc Haller (à gauche).

ATS

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12 août 2015 à 19:34

«En Suisse romande, il y a eu un magnifique travail d'harmonisation avec la Convention scolaire romande et le Plan d'études romand. La formation des enseignants n'a en revanche pas suivi», a expliqué Georges Pasquier, président du SER mercredi devant la presse à Lausanne.

Les neuf associations romandes qui composent le SER demandent, à l'instar du dossier sur les langues, un débat de fond pour les 20 ans à venir. «On interpelle la CIIP en tant qu'employeur: va-t-elle embaucher des gens mal formés pour s'occuper des 150'000 élèves romands?», a questionné M. Pasquier.

Plus de vision d'ensemble

Le syndicat déplore plusieurs insuffisances. Au niveau primaire, le plafonnement du bachelor à six semestres pose problème. La décision de limiter cette formation à trois ans oblige les Hautes écoles pédagogiques (HEP) à renoncer à former les étudiants dans certaines branches et à les «saupoudrer» de formations complémentaires.

Une durée de formation aussi brève est un anachronisme spécifiquement suisse. Il faudrait au moins une année supplémentaire. La très grande majorité des pays ont instauré des formations de quatre ans et plus, note-t-il.

On forme ainsi progressivement des semi-généralistes qui n'ont plus de vision d'ensemble, regrette le président. Ils ne maîtrisent plus l'ensemble du cursus, donc le développement global de l'élève.

Questions d'économie

Au niveau secondaire, ce n'est pas mieux. Les enseignants se voient de plus en plus fréquemment attribuer des heures pour des branches dans lesquelles ils n'ont pas été formés. Plus grave encore, il arrive que les autorités fassent appel à des personnes dépourvues de toute formation pédagogique.

Un enseignant en maths/sciences peut ainsi être sollicité pour donner des cours d'histoire, afin de combler un trou. «On est en train d'affaiblir la formation pour des questions d'économies», souligne Jean-Marc Haller.

Le secrétaire général du SER cite l'exemple de la HEP BEJUNE commune aux cantons de Berne, Jura et Neuchâtel. Entre 2009 et 2015, le nombre d'étudiants a augmenté de plus de 50%, alors que le budget a baissé de 12%.

Enseignement spécialisé

Alors que la considération de la profession se disloque, et que le métier se complique, les enseignants doivent répondre à de nouveaux besoins. Notamment l'intégration d'élèves en difficulté ou en situation de handicap dans les classes, et ce sans avoir reçu de formation adéquate.

«La formation d'enseignant spécialisé, c'est normalement 90 à 120 crédits. Aujourd'hui, on en saupoudre un peu dans la formation, c'est se moquer», note M. Haller.

«Un enfant vaut-il moins qu'un canari?»

Entre la proposition de l'UDC de former les enseignants avec un simple apprentissage, l'engagement de n'importe qui pour faire face à des pénuries, la menace d'une réduction d'une année de la formation genevoise, la société du 21e siècle a du souci à se faire sur la qualité de ses enseignants, estime le syndicat.

Le SER demande donc une formation initiale de haut niveau et un vrai statut de généraliste pour les deux premiers cycles. L'organisation du travail scolaire doit aussi être revue dans l'optique du partage et non de la division du travail.

«Le vétérinaire que vous appelez au chevet de votre canari fait beaucoup plus d'études (dix semestres) qu'un enseignant. Un enfant vaut-il moins qu'un canari?», a résumé M. Haller, revenant sur une citation du psychologue et enseignant Jacques-André Tschoumy.

Aussi Outre-Sarine

Outre-Sarine, les économies sont aussi le maître-mot. Comme annoncé récemment dans les médias, 250 millions y ont été économisés sur l'école en 2013 et 131 millions sont prévus jusqu'en 2018. M. Haller souligne que le phénomène, objet de la conférence de presse du SER en 2014, est pire en Suisse romande. L'an dernier, tous les cantons ont économisé, sauf Vaud, rappelle-t-il.

Suite à un rapport statistique publié en 2014, les Alémaniques se sont rendu compte qu'ils payaient beaucoup plus que les Romands. Ils réduisent donc leur budget. «C'est la politique du nivellement par le bas», déplore M. Haller

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