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Armes de guerre

La Suisse isolée sur les armes?

La Confédération serait pionnière sur la scène internationale si le peuple acceptait l’initiative interdisant le financement des producteurs d’armes. Est-ce utile? Question de valeurs


 Philippe Boeglin

Philippe Boeglin

9 octobre 2020 à 22:48

Temps de lecture : 1 min

Armement » Les votations du 29 novembre seront placées sous le signe de l’émotion. Le peuple se prononcera sur l’initiative pour des multinationales responsables, qui veut sanctionner les abus dans les pays émergents. Et, aux côtés de ce «monstre politique», une autre initiative sera soumise au vote, celle qui veut interdire le financement des producteurs de matériel de guerre. Ce texte passe plus inaperçu, mais il obéit, comme l’autre, à des réflexions éthiques et doterait la Suisse de règles avancées en comparaison internationale.

«Dans le monde, on ne connaît aucun pays qui aurait promulgué une interdiction de financement ayant une portée telle que celle visée par l’initiative», écrit dans la brochure de votations le Conseil fédéral, opposé à l’initiative. «Si l’initiative était acceptée, la Suisse se doterait d’un cadre légal assez pionnier», fait écho Thomas Bruchez, responsable chez les initiants et cosecrétaire politique du Groupe pour une Suisse sans armée (GSsA).

Premier de classe

Le consensus entre les deux camps s’arrête là. Pour les milieux bourgeois, industriels et le Conseil fédéral, l’initiative doit être refusée et ne sert à rien. Pour les initiants, la Suisse doit agir, même si cela l’amenait à lancer le mouvement à l’internationale.

Etre premier de classe, cela sert-il à quelque chose? La sénatrice écologiste Céline Vara (NE) en est convaincue. «Faisons le rapprochement avec la pollution: jette-t-on des déchets dans la rue si le voisin le fait? Chaque pays doit faire quelque chose et même si c’est une petite part, c’est notre part. On ne peut pas déresponsabiliser un Etat. Je suis contre cette manière de faire de la politique, qui se concentre sur ce que celui d’à côté fait ou ne fait pas.»

L’antimilitariste Thomas Bruchez abonde. «La place financière suisse est importante, cela aurait donc un impact certain d’interdire le financement des fabricants d’armes. La Suisse dispose ici d’un bon levier. On ne peut pas amener la paix dans le monde d’un claquement de doigts, mais on peut y contribuer.»

Investisseurs visés

L’initiative poursuit un but simple: interdire tout financement des fabricants de matériel de guerre, qu’ils produisent des pistolets, des bombes, ou des pièces détachées. Si le peuple vote «oui», toute entreprise qui génère 5% de son chiffre d’affaires grâce à de tels produits ne pourra être financée par les canaux habituels. Les banques, caisses de pension et le fonds AVS/AI devraient revoir leurs stratégies d’investissements.

Les antimilitaristes veulent étendre une interdiction existante. Aujourd’hui déjà, la Suisse prohibe la fabrication, la commercialisation et le financement direct des armes nucléaires, chimiques, biologiques, des bombes à sous-munition et des mines antipersonnel. Elle autorise néanmoins les fonds d’investissement contenant des titres de multiples entreprises, dont certaines travaillent dans le nucléaire. L’initiative bifferait ces pratiques.

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