Un projet de mosquée sort de l’ombre
Fribourg • L’association Mosquée de Fribourg (MOFRI) a été créée, il y a bientôt deux ans, dans le but de construire un lieu de culte pour la communauté musulmane du canton. L’emplacement n’est pas encore connu.
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5 octobre 2015 à 21:30
Le projet est jusqu’ici resté opaque si ce n’est méconnu. La construction d’une mosquée à Fribourg est sortie du bois dimanche dernier lors d’un rassemblement des musulmans du canton qui ont célébré, à Belfaux, la fête du sacrifice («LL» d’hier). L’association MOFRI (Mosquée de Fribourg) a en effet tenu un stand lors de cette manifestation afin d’y présenter ses objectifs. Inscrite depuis début février 2014 au Registre du commerce fribourgeois, cette jeune association a pour but, comme son nom l’indique, d’acquérir ou de construire une mosquée à Fribourg. Ce serait la première du genre.
«Le projet s’adresse à toute la communauté musulmane du canton, sans distinction aucune. Nous travaillons avec les autres associations et complétons leur travail déjà important pour la communauté. Nous collaborons avec toutes les organisations existantes et à venir. Notre seul critère étant l’utilité à la communauté et le respect des principes de la religion musulmane», peut-on lire sur le site internet de l’association dont le président, Max Corpataux, est resté hier inatteignable malgré nos nombreux appels. De même que le «contact» francophone figurant sur le site internet, Jean-Michel Golliard.
Appel aux dons
L’association explique vouloir combler des besoins «religieux et culturels». «Offrir une mosquée afin que les musulmans puissent accomplir leurs cinq prières journalières, la prière du vendredi et les autres rites religieux, notamment ceux qui sont liés au mois de Ramadan et aux deux fêtes annuelles», détaille-t-elle en ajoutant encore souhaiter un lieu pour encadrer les enfants de la communauté qui est, dans sa majorité, formée de jeunes gens.
L’objectif est également d’offrir d’autres services religieux pour des événements comme des naissances, mariages ou décès. MOFRI compte en outre obtenir «la reconnaissance de la religion musulmane au niveau cantonal» en mettant en avant la présence de plus de 12 000 musulmans en terres fribourgeoises.
Toujours sur son site, l’association donne une évaluation financière d’un tel projet dont l’emplacement n’est pas évoqué. Les coûts «prévisionnels» sont devisés à 3,7 millions de francs. Un montant qui comprend environ 1 mio pour l’achat du terrain et 2,5 mio pour la construction d’un bâtiment. «Construire une mosquée nécessite beaucoup d’énergie et d’argent. Nous avons choisi de travailler dans la transparence totale et en pleine harmonie avec les lois et les directives cantonales», poursuit MOFRI qui lance dès lors un appel aux dons.
Et de préciser: «Nous devons travailler dans l’esprit du pays fondé sur le respect des différences culturelles, tout en nous attachant aux valeurs de l’islam, que nous estimons de grande utilité pour notre société suisse.»
Suivre les règles…
Que pense l’Association des musulmans de Fribourg (AMF) de ce projet? «Je ne le connais pas, il n’y a aucun lien avec nous, Je n’ai pas d’avis», répond, dans un premier temps, son président Ridha Ajmi avant de se raviser. «J’en ai entendu parler…» Et pour cause, il a été membre du comité du MOFRI selon les données du Registre du commerce. «Mais je n’en fais plus partie et pour des raisons qui ne regardent pas l’opinion publique», poursuit-il. Et de rappeler que la ville de Fribourg compte actuellement quatre lieux de culte dont celui de l’AMFR situé dans le quartier de Beaumont.
La construction d’une mosquée serait évidemment «intéressante» selon le responsable. «Mais pas à n’importe quel prix et en suivant les règles comme c’est le cas lors de tous projets liés à des lieux de culte», explique Ridha Ajmi en estimant qu’une telle construction n’est pas obligatoire et ne constitue pas «une fin en soi». I
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Problème de locaux
Parmi celles et ceux qui ignoraient jusqu’à hier l’existence d’un projet de construction d’une mosquée figure la Direction des institutions, de l’agriculture et des forêts (DIAF). «Nous n’avons pas été sollicités à ce propos», indique Samuel Russier. Le secrétaire général de la DIAF note toutefois que la conseillère d’Etat, Marie Garnier, est à «l’écoute des besoins des communautés musulmanes» notamment en ce qui concerne la question des locaux. Il existe quatre lieux de prières à Fribourg, répartis dans les quartiers de Pérolles, Jura, Beaumont ainsi qu’au centre-ville. Une rencontre entre une délégation du Conseil d’Etat et des représentants des communautés musulmanes a eu lieu en février 2014 afin d’évoquer la problématique des lieux disponibles et la difficulté d’en trouver. C’est également durant le même mois que l’association Mosquée Fribourg (MOFRI) a été inscrite au Registre du commerce. «Mais aucune construction ni projet allant dans ce sens n’a été abordé», indique Samuel Russier tout en précisant que la DIAF est consciente des soucis rencontrés par les musulmans dans la recherche de locaux.
En quoi une mosquée se différencierait-elle des autres lieux de culte? «Il n’y a pas de différence majeure. Les centres culturels fonctionnent déjà comme des mosquées», relève Mallory Schneuwly Purdie, présidente du Groupe de recherche sur l’islam en Suisse. «Mais cela traduit un changement de perspective par rapport aux premières associations musulmanes qui s’étaient structurées selon des logiques ethnico-nationales, à l’image des associations de migrants espagnols ou portugais. Aujourd’hui, construire une mosquée, démontre cette volonté de se départir des appartenances culturelles et linguistiques et d’affirmer son appartenance religieuse.» SSc
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