7 décembre 2015 à 15:48
Dans le regard de Laurence Boissier, l’existence n’a rien d’un flux monotone et uniforme. Elle préfère y voir un assemblage de fragments disparates: petites hontes, grandes colères, infimes illuminations, réjouissances minuscules, ancrées dans autant de lieux qui en deviennent le théâtre. L’artiste genevoise les investit dans son magnifique Inventaire des lieux, ouvrage entre expérimentation littéraire et livre d’artiste. On y découvre ses «notes de terrain», courtes proses qui, dans une démarche très perecienne, tentent d’épuiser ces fragments de réel en les documentant avec humour.
De la nuit à l’hôtel, sur ce matelas qui est une «lente pâtisserie», au jardin zoologique en passant par la piste de danse, Laurence Boissier laisse refluer les souvenirs de son enfance et prend acte, en toute subjectivité, de ces lieux qui sont autant de supports d’une expérience vécue. Et l’on découvre l’impuissance obtuse de celle qui ne parvient pas à sortir de l’eau en skis nautiques, son endurance de mère menant son chariot au supermarché comme un paquebot sur le canal de Panama, son abandon dans la masse humaine du métro bondé. Autant d’historiettes à la fois sincères et cocasses qui, renouvelant le regard sur le réel, touchent à l’universel. N’est-ce pas là l’essence même de la littérature? I
> Laurence Boissier, Inventaire des lieux, Ed. Art&Fiction, 136 pp.
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