Lettre à nos aînés » Il faisait très chaud pour un jour d’hiver. Le soleil me chauffait les joues, et l’étoile qu’on avait suspendue à la fenêtre pour le Père Noël s’était mise à briller. On était tous les trois dans le jardin, et on jouait à faire de la musique avec les ustensiles de cuisine de Mamy «Yaya». J’avais ma doudoune et mon bonnet «chat», mon favori, et je tournais en rond comme une hélice en chantant, ça vous faisait pleurer de rire. J’aime bien vous entendre rire, et je voulais que ça ne s’arrête jamais. En face du cabanon, Coco aboyait pour nous accompagner. Après manger, je me suis endormi sur les genoux de Papy «Bobo» qui m’a installé dans le cabanon pour la sieste.
A mon réveil, maman et papa étaient là, et je sentais que quelque chose était différent. Ils ont dit: «Il faut partir maintenant! Fais au revoir à papy et mamy!» Et quand j’ai voulu vous embrasser, ils m’ont tiré par la main brusquement: «On ne fait pas de bisous aujourd’hui!» J’avais peut-être fait quelque chose de mal? Une bêtise? J’ai tout tenté pour rester encore quelques minutes avec vous. Crier et bouder, ce sont mes armes préférées. Ça n’a pas marché. C’est la dernière fois que j’ai senti votre odeur et touché la douceur de votre peau.
Depuis, je vous vois dans un écran. J’ai beau essayer avec mes petites mains de traverser l’image, je ne suis pas encore assez costaud pour y arriver. Vos papouilles me manquent. Pourquoi je peux plus venir chez vous? Je suis puni? Papa m’a expliqué que c’est à cause d’un «Birus» que je peux plus vous voir. «Un sale truc invisible», a ajouté maman. Comment est-ce qu’un truc sale et qu’on voit même pas peut nous éloigner? Je sais pas, mais je vous promets que je deviendrai plus grand et fort que ce «Birus» pour qu’il ne puisse plus nous séparer. Je vous aime. Votre petit-fils Esteban.
Patricia Tella Lectrice, Lausanne
Rubrique lancée par La Liberté, Arcinfo, Le Quotidien jurassien, Le Journal du Jura et Le Nouvelliste. A écouter aussi Porte-Plume, à 11 h, sur RTS-La Première. Pour vos lettres à nos aînés: redaction@laliberte.ch
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